La construction de la promotion de la diversité

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La France n'a pas encore revisité son modèle d'intégration qui apparaît complètement obsolète au regard des avancées observées pour la diversité au Canada, en Grande-Bretagne, en Belgique et aux États-unis. Les politiques manquent totalement de pragmatisme et s'arque boutent devant le premier chiffon rouge agité sous leurs yeux. Tel a été le cas à propos des statistiques dites « ethniques » que nous préférons nommer : mesures de la diversité. Pourquoi nous en priverions-nous si elles peuvent être utiles à la lutte contre les discriminations et si elles favorisent la cohésion nationale? Et comment l'Etat pourrait-il mettre en place des politiques publiques, compensatrices des inégalités, efficaces voire contraignantes sur certains territoires ou vis à vis d'entreprises peu scrupuleuses et peu civiques -dédaignant la charte de la diversité- , s'il ne possède pas de données fiables? A ce titre la disparition annoncée de la HALDE ( Haute autorité de lutte contre les discriminations et les exclusions ) au profit du Défenseur des droits est un mauvais coup du Gouvernement contre les victimes de discriminations. Dans cet ordre d'idées le plan « Espoir Banlieues » de Fadéla Amara -une coquille vide- n'a en rien modifié les inégalités territoriales et les discriminations subies par une grande partie des Français et des résidents étrangers des banlieues. Pire encore, le débat sur l'identité nationale est venu mettre à mal la cohésion sociale et déchirer les pages du roman national sur lesquelles nous devions figurer, nous Français issus de la diversité. Tout en permettant la montée en puissance inquiétante d'une extrême-droite xénophobe et raciste que nous devons combattre pied à pied sur le front républicain. Nous déplorons cet état de fait, et nous sommes conscients, de plus en plus nombreux, de la place que nous devons prendre dans la construction de la promotion de la diversité. Même si nos expériences et nos expertises dérangent, elles existent et nous ferons tout pour faire valoir nos droits. Préparons-nous à faire entendre notre voix, à peser fortement sur les élections présidentielles à venir, notamment pour permettre aux résidents étrangers de voter lors des élections locales. Il y va de notre dignité et du respect dû à nos glorieux aînés. Il est temps également de porter une proposition de loi pour permettre l'émergence de la diversité, à l'instar de celle concernant la parité qui a permis aux femmes d'exercer des fonctions politiques. Nous lançons le débat public qui a toujours été escamoté par ceux qui veulent nous leurrer par une soi -disante égalité républicaine (dont on attend toujours les effets).

La bonne nouvelle c'est la solidarité entre nos associations. Le travail est multiforme: il prend parfois l'aspect de groupes de paroles avec le Collège des Parents. Il est aussi exprimé par des conférences-débats organisés par le journal Repères+ ou la FNAFA. Nos actions vont au-delà de l'Atlantique en direction des Etats-Unis ou de l'Afrique par le biais de la culture ( Racines, APEC), des chantiers de solidarité internationale et du devoir de mémoire. Sur ce dernier point, Aimé Césaire et Edouard Glissant, ces deux géants de la littérature, disparus dernièrement, ont toujours entretenu la flamme du souvenir, de la fraternité et de l'humanité. Ils sont à cet égard proches de Joseph Ndiaye le Conservateur national de la Maison des Esclaves de l'île de Gorée et de Sembène Ousmane, l'un des plus grands écrivains cinéastes d'Afrique noire. Ils nous ont laissé en héritage leur amour de la justice et leur foi dans les potentialités du continent noir, marqué par l'horrible déportation qui a fait la fortune de l'Amérique et de l'Europe, tout en le saignant de ses forces vives. Nous le savons, malgré les foyers de tension (Côte d'Ivoire, Burkina-Faso, République démocratique du Congo ...), l'Afrique noire va décoller économiquement dans les vingt prochaines années : des éléments objectifs corroborent cette thèse ( les richesses naturelles, la démographie, la démocratie, le niveau d'éducation, la mise en place d'infrastructures). Les commémorations de l'abolition de l'esclavage du 10 mai prennent ainsi du sens, pour les fils d'immigrés que nous sommes. Elles réinterrogent sans cesse sur les droits civiques bafoués des enfants des Tirailleurs Sénégalais.

Louis Mohamed SEYE

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